Utilisation d'ingrédients alternatifs et locaux dans l'élevage porcin

Par Bing Guo, El Mehdi El Ouahli, John Dunne, Pierre-André Geraert

Nous traversons actuellement une période difficile marquée par des prix élevés des matières premières et une disponibilité limitée de certaines d'entre elles. L'utilisation de matières premières moins courantes, facilement disponibles et potentiellement moins chères, peut constituer une alternative aux sources traditionnelles de protéines et d'énergie et contribuer à réduire la pression sur les coûts des aliments pour animaux. Toutefois, les nouveaux types d'ingrédients doivent faire l'objet d'une attention particulière pour s'assurer qu'ils conviennent à la transformation des aliments pour animaux, qu'ils sont exempts de contaminants et qu'ils peuvent fournir la bonne quantité de nutriments aux animaux pour des performances et une santé optimales.

La volatilité des prix favorise l'utilisation d'ingrédients alternatifs pour l'alimentation animale. Mais comment maintenir la qualité des régimes alimentaires et les performances des porcs lorsque l'on adopte de tels ingrédients ?

La recherche d'ingrédients alternatifs

Selon des chiffres récents de Rabobank (2022), le soja domine toujours les marchés mondiaux, les États-Unis, le Brésil et l'Argentine étant les trois plus grands producteurs. Le tourteau de soja est l'un des principaux ingrédients de l'alimentation animale dans le monde entier en raison de sa valeur nutritionnelle, de la stabilité de sa qualité et de sa disponibilité, ce qui lui vaut d'être considéré comme "l'étalon-or" de l'alimentation animale. Toutefois, avec les hausses à deux chiffres des prix du marché observées l'année dernière, le soja n'est - métaphoriquement - pas loin d'avoir la même valeur que l'or véritable.

En raison de la flambée des prix (ainsi que des préoccupations environnementales liées à la production de soja, entre autres), les nutritionnistes animaliers et les agriculteurs recherchent de nouveaux moyens de réduire les coûts des aliments pour animaux. La tâche n'est pas aisée, car les sources de protéines alternatives, telles que la farine de colza, la farine de tournesol, la farine d'arachide et la farine de coton, sont peu disponibles. En outre, la production et la disponibilité de farine de colza et (surtout) de farine de tournesol sont aujourd'hui fortement affectées par la guerre en Ukraine, l'Ukraine et la Russie étant les principaux producteurs de ces produits.

Une attention particulière est nécessaire pour une utilisation optimale

Malgré leur disponibilité limitée, l'utilisation d'ingrédients alternatifs est devenue incontournable dans la plupart des régions du monde. Lors du remplacement (total ou partiel) du tourteau de soja par des ingrédients alternatifs (provenant souvent de fournisseurs nouveaux et différents), il est essentiel de déterminer leur valeur nutritionnelle et leur qualité globale. L'utilisation d'ingrédients alternatifs et moins courants pour l'alimentation animale peut être particulièrement bénéfique du point de vue du coût et de la nutrition, mais elle peut nécessiter une attention particulière pour trouver la meilleure façon de les utiliser dans les régimes alimentaires des animaux. Les ingrédients alternatifs peuvent avoir une teneur en fibres et en protéines inconstante et irrégulière (voir tableau 1), peuvent contenir des niveaux élevés de mycotoxines, peuvent réagir différemment dans les équipements de transformation des aliments pour animaux (déjà existants) et/ou avoir un certain goût auquel les animaux ne sont pas habitués (ce qui peut avoir un impact sur les niveaux d'ingestion d'aliments). Il convient de garder à l'esprit qu'il n'y a pas de mauvais ingrédients pour l'alimentation animale et qu'ils doivent simplement être utilisés de la bonne manière.

Tableau 1. Quelques caractéristiques d'une sélection d'ingrédients alternatifs (par rapport au tourteau de soja).

Adaptation des pratiques dans la fabrique d'aliments pour animaux

L'utilisation d'ingrédients alternatifs ou nouveaux peut avoir un effet à différents niveaux (et sur les coûts) dans les usines de production d'aliments pour animaux. Avant de prendre la décision d'utiliser quelque chose de nouveau, il est nécessaire de s'assurer que l'ingrédient peut être utilisé en toute sécurité, qu'il est compatible avec l'équipement existant de l'usine et qu'il ne devrait pas augmenter les coûts de transformation des aliments pour animaux. Cela peut s'avérer difficile, car les nouveaux ingrédients peuvent être livrés en plus petites quantités (des sacs plus petits, par exemple), provenir de régions différentes et ne pas se prêter au stockage en silos. Cela peut nécessiter plus de main-d'œuvre et un plus grand espace de stockage.

La densité du matériau, sa résistance aux parasites et aux moisissures et les niveaux de retrait peuvent également différer de ceux des ingrédients couramment utilisés. En outre, les propriétés des aliments pour animaux (telles que la dureté, la teneur en eau, la teneur en fibres et la taille des particules) peuvent avoir un effet sur le débit (kg/heure) et la consommation d'énergie de l'équipement de traitement des aliments pour animaux. Par exemple, certains ingrédients alternatifs peuvent nécessiter un temps de mélange plus long, ce qui entraîne une augmentation des coûts énergétiques. L'utilisation d'ingrédients alternatifs peut également augmenter les coûts du contrôle de la qualité, étant donné que davantage d'analyses d'aliments sont en moyenne effectuées sur des matières premières inconnues.

Mini-adaptations en cas de changement de formule alimentaire

L'utilisation d'ingrédients alimentaires alternatifs peut réduire les coûts d'alimentation et les coûts de production globaux. Mais cela n'est vrai que si le nouveau régime n'a pas d'effet négatif sur la consommation d'aliments ou sur les performances et la santé des animaux. Si tel est le cas, les ingrédients les moins chers peuvent s'avérer coûteux. Les performances des animaux peuvent être affectées par l'utilisation d'ingrédients non appétents. Les porcs sont particulièrement sensibles au goût des aliments (ils ont même plus de papilles gustatives que les humains et les chiens). Lorsqu'ils détectent un goût amer, l'instinct naturel des animaux est de cesser de manger, car l'amertume dans la nature est souvent le signe de composants toxiques et malsains.

Certains ingrédients alimentaires alternatifs peuvent présenter une certaine amertume, qui peut dépendre, entre autres, du type d'ingrédients et de la méthode de transformation utilisée. Les lectines, le gossypol et les alcaloïdes sont des exemples de composants qui affectent négativement la prise alimentaire. Lorsqu'on modifie la formulation d'un aliment, les animaux doivent parfois procéder à quelques mini-adaptations, ce qui peut entraîner de petites perturbations dans l'ingestion d'aliments. Ce phénomène est souvent observé au début de l'ingestion d'un nouveau régime ou lorsque la qualité de l'ingrédient est légèrement différente (par exemple, une qualité différente de DDGS - une couleur différente), comme le montre la figure 1. Il est évident qu'il faut éviter les baisses trop importantes de la consommation d'aliments, car elles influencent négativement l'efficacité alimentaire globale et les performances des animaux.

Figure 1. L'adaptation à une nouvelle formule alimentaire peut entraîner une baisse de la consommation d'aliments.

Prévenir les pertes d'éléments nutritifs dues aux contaminants

Les performances et la santé des animaux peuvent également être compromises lorsque les ingrédients sont contaminés. La présence de moisissures, de bactéries et de lipides oxydés sont des exemples qui peuvent entraîner de graves pertes de nutriments, une diminution de l'appétence et une baisse de la consommation d'aliments. Lorsque des moisissures productrices de mycotoxines sont présentes dans les aliments, les effets sur les performances des animaux et les pertes économiques peuvent être encore plus graves. Les mycotoxines constituent un défi particulier pour les ingrédients alternatifs des aliments pour animaux, et même un faible taux d'inclusion dans l'alimentation peut contribuer au risque final. Les ingrédients de substitution couramment utilisés, tels que les DDGS, le son de blé et la mouture de blé, présentent tous un risque relativement élevé de contenir des mycotoxines. Cependant, tous les types de matières premières sont sujets aux moisissures et à la formation de mycotoxines, qui dépendent des conditions météorologiques, de la production agricole, de la récolte, du transport, des conditions de stockage et de la transformation des aliments pour animaux. Il n'existe pas non plus de kits d'analyse rapide pour tester les mycotoxines dans les matières premières alternatives, et le contrôle d'une gamme variée de matières premières de qualité variable prend plus de temps. Il est recommandé de tester les aliments finis plus souvent lorsque différents (nouveaux) ingrédients sont utilisés et de ne pas utiliser trop de nouveaux ingrédients à la fois, afin d'éviter de multiples défis en même temps.

Solutions pour maintenir la qualité de l'alimentation et la performance des animaux

Plusieurs approches efficaces sont disponibles pour aider à prendre la bonne décision lors de l'utilisation d'ingrédients alternatifs pour l'alimentation animale en période de volatilité et d'incertitude des conditions du marché.

• Méthodes rapides d'analyse des aliments pour animaux : L'utilisation du NIR est un moyen rapide et précis de déterminer les valeurs nutritionnelles, ce qui est essentiel pour un contrôle optimal de la qualité des ingrédients alternatifs des aliments pour animaux, dont la teneur en nutriments est susceptible de varier. Les aliments finis doivent être régulièrement testés pour détecter les mycotoxines. En savoir plus sur le service PNE.
• Enzymes : L'utilisation d'enzymes peut augmenter la digestibilité d'ingrédients alternatifs pour l'alimentation animale qui sont susceptibles d'avoir une teneur élevée en fibres et peut aider à atténuer la variabilité des ingrédients. En savoir plus sur Rovabio® Advance.
• Inactivateurs de mycotoxines : L'utilisation de ces produits dans l'alimentation aide les animaux à surmonter le défi des mycotoxines dans les ingrédients alimentaires à haut risque (tels que les DDGS). En savoir plus sur notre gamme de désactivateurs de mycotoxines : Unike Plus, Toxy-Nil Plus et Toxy-Nil.
• Antioxydants : La supplémentation des régimes alimentaires des animaux avec des antioxydants tels que l'Oxy-Nil peut aider à prévenir l'oxydation des graisses et des protéines des ingrédients alimentaires alternatifs qui sont sensibles à ce type de dégradation.
   
• Améliorateurs d'appétence : Permettent une utilisation plus souple des ingrédients alternatifs en garantissant une appétence constante et l'acceptation de l'aliment, y compris en surmontant la baisse d'ingestion due à l'adaptation lorsque des changements sont apportés à la formule de l'aliment. Découvrez nos solutions en matière d'appétence.

Adisseo offre une variété de solutions qui sont essentielles pour que les ingrédients alimentaires alternatifs fonctionnent dans les régimes alimentaires des animaux. Ces solutions comprennent des services NIR (plateforme d'évaluation nutritionnelle précise d'Adisseo), des améliorateurs d'appétence, des stimulateurs de digestibilité et des produits pour gérer la conservation des aliments et les mycotoxines. L'effet positif de la multi-NSPase d'Adisseo (Rovabio®) sur la dégradabilité de la matière sèche a été démontré lors d'un essai in vitro. Le tableau 2 présente les résultats de l'ajout d'enzymes sur la dégradabilité et la variance de la matière sèche.

Tableau 2. Dégradabilité de la matière sèche d'une série d'ingrédients alimentaires, avec et sans enzymes.

En résumé, l'utilisation d'ingrédients alternatifs pour l'alimentation animale augmente actuellement en raison des prix élevés d'ingrédients couramment utilisés tels que le tourteau de soja. Toutefois, la disponibilité des ingrédients alternatifs, tels que le tourteau de colza et les DDGS, est encore bien inférieure aux volumes de tourteau de soja produits précédemment et peut différer en termes de qualité. Par conséquent, la qualité et la valeur nutritionnelle des ingrédients alternatifs pour l'alimentation animale doivent être surveillées de près. Des variations dans les teneurs en protéines et en fibres, des risques plus élevés de mycotoxines et la présence de certains composants amers peuvent entraîner une baisse des niveaux d'ingestion d'aliments et des pertes de nutriments. Un ingrédient bon marché peut donc finir par représenter un coût supplémentaire, en raison de la perte de performance des animaux. L'utilisation d'additifs alimentaires (tels que Rovabio®), l'analyse régulière des valeurs nutritionnelles à l'aide de méthodes rapides (NIRS comme PNE) et l'analyse régulière des aliments finis pour détecter les contaminants permettent de contrôler les problèmes liés à l'utilisation d'ingrédients alimentaires nouveaux pour le nutritionniste, l'agriculteur et les animaux.

Nous sommes impatients de discuter de nos produits et solutions avec vous individuellement afin de vous aider à prendre des décisions mieux informées lorsque vous envisagez d'utiliser des ingrédients alternatifs dans vos formulations d'aliments pour animaux.

Les noms de produits et leur disponibilité peuvent varier selon les régions. Pour plus d’informations, veuillez contacter votre représentant local Adisseo.